Nous voudrions du calme en ce monde de brutes
Où règnent l’esprit dur la violence membrue
Pour atteindre un refuge où la douceur s’abrite
Il faut sur notre route écarter les débris
Nous rêvons de pensées qui soient moins encombrantes
Portées par des espoirs plus légers moins vibrants
Nous voudrions du calme en ce monde de brutes
Où règnent l’esprit dur la violence membrue
Douceur fait souvent mieux que force qui se cabre
Encore que parfois les gens inquiets dans l’ombre
Aient le besoin de se remettre en équilibre
En faisant éclater la colère salubre
Au cœur de leurs désirs en ce monde de brutes
Maryvonne m’a suggéré d’écrire un poème sur la douceur. Ce n’est pas un sujet négligeable. Aristote oppose la douceur à la colère et en fait une vertu. « Etre doux veut dire en effet rester imperturbable, et ne pas se laisser emporter par son affect(ion), mais comme le prescrirait la raison, manifester sa mauvaise humeur pour les motifs et pour le temps qu’il faut […] La douceur cependant passe pour une faute qui va plutôt dans le sens du défaut […] En effet, ceux qui ne s’irritent pas pour les motifs qu’il faut passent pour des sots […] Car on donne alors l’impression d’être insensible ou de ne pas être peiné, et faute de manifester sa colère, on donne le sentiment de n’être pas capable de se défendre. Or accepter d’être traîné dans la boue ou détourner les yeux quand ses intimes le sont semblent des attitudes serviles » (Éthique à Nicomaque, IV, 1125 b 25 – 1126 a 10). Dans les évangiles, la douceur fait partie des béatitudes : « Heureux les doux, ils auront la terre en partage », dit Jésus dans le discours sur la montagne (Matthieu, 5, 5-2). « Prenez sur vous mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur », dit-il encore (Matthieu 11, 29). La douceur est liée à l’humilité, mais cette dernière n’est pas toujours vertueuse, si l’on en croit Descartes. Cela dit, plutôt que d’invoquer la philosophie et la spiritualité pour parler de ce sujet, on pourrait se contenter d’adopter le ton familier d’un proverbe cité par le dictionnaire de Littré : « On prend plus de mouches avec du miel qu’avec du vinaigre. »
Dominique Thiébaut Lemaire